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pour faire entrer dans l'alliance, le dsir comme dsir du tabac
et un certain travail du deuil li l'incinration du reste? Si
un tel rapport existe, comment le dterminer? Voil une des
questions qui vont dsormais nous occuper. Elle s'annonce
depuis longtemps. Pour s'en tenir encore Yincipit et aux
premires lignes d'un texte, rappelons-nous l'ouverture du
Don Juan de Molire. Sganarelle tient une tabatire : Quoi
que puisse dire Aristote et toute la Philosophie, il n'est rien
d'gal au tabac : c'est la passion des honntes gens, et qui vit
sans tabac n'est pas digne de vivre. Non seulement il rjouit
1. Ds lors qu'on ne consomme le tabac ni l'tat cru, ou naturel ,
ni l'tat cuit, Lvi-Strauss lui assigne un statut mta- ou ultra-
culinaire , par opposition au statut infra-culinaire du miel : ... la
manire la plus commune de consommer le tabac met celui-ci, la
diffrence du miel, non pas en de mais au-del de la cuisine. On ne
l'absorbe pas l'tat cru, comme le miel, ou pralablement expos au
feu pour le cuire, ainsi qu'on fait de la viande. On l'incinre, afin
d'aspirer sa fume. (Mythologiques, II. Du miel aux cendres, Plon, 1966,
p. 11 et 13). L'ultra-culinaire donne lieu des procds tantt compl-
mentaires (l'incinration des plumes et du tabac), tantt supplmentaires
(l'incinration sur un bcher) au regard du rsultat (cf. p. 21-22). Le
rle pivot dvolu au tabac dans le systme tient en particulier au
fait qu'il conjoint des valeurs contradictoires. Seul le tabac digne de
ce nom marie des attributs gnralement incompatibles (p. 22 ; cf.
aussi p. 49). Sur cette ambivalence, cf. supra, ch. 2 n. 1., p.53.
2. Sur ces problmes, il faudra dsormais se rfrer (j'espre le faire
plus prcisment plus tard) au livre rcent et fondamental de Jean-Luc
Nancy, Une pense finie, Galile, 1991, notamment aux chapitres L'in-
sacrifiable et L'offrande sublime .
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L'excuse et le pardon
et purifie les cerveaux humains, mais encore il instruit les mes
la vertu et l'on apprend avec lui devenir honnte homme.
Ne voyez-vous pas bien, ds qu'on en prend, de quelle manire
obligeante on en use avec tout le monde, et comme on est
ravi d'en donner droite et gauche, partout o l'on se
trouve? On n'attend pas mme qu'on en demande, et l'on
court au-devant des souhaits des gens : tant il est vrai que le
tabac inspire des sentiments d'honneur et de vertu tous ceux
qui en prennent. (Je souligne, J.D.) Il faut savoir que le
tabac, alors connu en France depuis un sicle, tait interdit
la vente par Louis XIII et condamn par les dvots. L'offrande
et l'usage du tabac font accder l'honneur et la vertu en
levant au-dessus de la pure et simple circulation conomique
des besoins et des productions dits naturels, au-del du nces-
saire. C'est le moment de la fte et du luxe, de la gratuit
comme de la libert. Pour peu qu'on accrdite sans rserve
une telle distinction (ce dont nous nous garderons ici, une fois
de plus), le tabac semble ouvrir la scne du dsir au-del
du besoin.
Pour dire sa dception , Michel Serres met brivement en
1. Ouvrez maintenant l'Essai sur le don, vous ne manquerez pas
d'tre du. Vous y trouverez partie et contre-partie, l'aumne et le
banquet, la loi suprme qui dicte la circulation des biens de mme
faon que celle des femmes et des promesses, des festins, rites, danses
et crmonies, des reprsentations, injures et plaisanteries; vous y trou-
verez le droit et la religion, l'esthtique et l'conomie, la magie et la
mort, la foire et le march, la comdie enfin. Fallait-il errer trois sicles
sur l'Sil glauque du Pacifique pour apprendre lentement des autres ce
que nous savions dj de nous-mmes, pour assister outre-mer des
scnes archaques, les mmes que nous reprsentons tous les jours au
bord de la Seine, au Franais ou la brasserie d'en face? ( Le don
de Dom Juan , Critique, 250, mars 1968, p. 263). A moins qu'elle
ne soit joue, cette dception devant un Essai sur le don qui ne dit ni
ne donne rien qu'on ne puisse trouver dans son pays traduit l'envers
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Donner le temps
rapport ce motif du tabac dans Don Juan avec l'essai de
Mauss. On devrait aussi rappeler, Michel Serres ne le fait pas,
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